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CE QUI NOUS REND PLUS FORTS
18 octobre 2012

Un point de départ

"Je n'avais même pas le choix, je ne devais même pas faire un choix. Avec le caractère que j'avais, je n'avais rien à choisir. Je me retrouvais automatiquement du côté de ceux qui protestent, qui s'insurgent, du côté des partisans, des rouges, des homosexuels, des Arabes et des communistes, des Noirs et des Portoricains." 

Il m'avait fallu un point de départ, et cette phrase écrite par l'écrivain russe Edouard Limonov en était un. Cette phrase a résonné en moi de façon particulière. Non pas que je m'identifiasse à Limonov, c'était impossible: Limonov vivait à New-York, et c'était les années soixante-dix. Il aurait pu aller voir jouer Television au CBGB's. Je ne crois pas qu'il l'ait fait. Limonov était complètement paumé à l'époque. Il clamait que l'Amérique n'était pas mieux que l'URSS - et il avait raison, du moins du point de vue du poète qu'il était. Réfractaire au dirigisme étatique, il l'était autant vis-à-vis de la société de consommation. Qui plus est le rêve américain vanté par Sakharov lui avait volé sa femme. Les manoeuvres du FBI pour contrôler les contestataires lui rappelaient celles du KGB. Limonov fréquentait les réunions du Parti des Travailleurs. Un poète exilé russe à New-York qui rejoint les rangs des communistes américains. Plutôt marrant. Sauf que Limonov n'était pas communiste, c'était (à l'époque du moins, quand il avait trente ans) un gauchiste de la pire espèce, et il a fallu que je tombe sur le premier roman de ce poète qui pourrait être mon père - j'avais 10 ans en 76 - pour trouver (enfin) quelqu'un qui pense comme moi. Car je suis certainement un gauchiste de la pire espèce, de ceux qui prônent une seule chose: le chaos.

Limonov était pour la suppression du travail - du travail aliénant, bien sûr -, et avec lui de l'argent. Quand vous balancez ça dans une conversation (SUPPRIMONS L'ARGENT! SUPPRIMONS LE TRAVAIL!), on vous regarde bizarrement. C'était le cas quand j'avais vingt ans, c'est le cas aujourd'hui encore. Sur ce plan-là, je n'ai pas tellement évolué. Pourtant ça me semblerait une avancée considérable de la civilisation que de cesser de réduire en esclavage quasiment l'ensemble de la population mondiale. Parlez de la suppression du travail - et de l'argent - à un bourgeois, et vous ne recevrez en retour que du mépris; à un type soit-disant de gauche et il vous rira au nez. Mais les types soit-disant de gauche, sont-ils ceux-là qui ont voté Hollande aux dernières élections? Je ne sais pas. Il n'y a plus tellement de types de gauche, je crois. Personnellement je n'ose même pas prétendre être de gauche, quand je vois qui sont les porte-étendards de la gauche. Et je pensais la même chose quand j'avais vingt ans et que mes aînés votaient socialiste. On voit où ça nous a mené. Un jour tout le monde doit rendre des comptes. Limonov raconte que la première chose qu'on a dit aux ouvriers russes après la Révolution d'octobre, c'est de retourner à l'usine. Les pauvres, ils sont restés sur le cul. Ce sont eux qui ont fait la Révolution, et tout ce qu'ils ont gagné c'est de retourner bosser. C'est les mecs d'en haut qui ont changé. Les mecs d'en bas, c'est toujours les mêmes.

Ne vous inquiétez pas, je ne vais pas vous bassiner avec la politique. J'ai démarré sur Limonov, parce que j'adore son livre, que j'aime les Russes, que j'admire les poètes. Vous avez vu cette vidéo où Poutine oblige un patron qui s'apprêtait à licencier ses ouvriers ou à fermer son usine à revenir sur sa décision? Il le force à signer un document officiel. Rien qu'avec le regard qu'il lui lance il le fait chier dans son froc. C'est pas en France qu'on verrait ça. Les Russes ont des couilles. Ils ne se laissent pas emmerder. Ni par les Américains ni par les punkettes. Ils sont entrés en résistance. Ils ne lâcheront pas la Syrie. Ils ont viré un certains nombres d'ONG financées par les Etats-Unis dont on sait très bien qu'il s'agit d'infiltration, que la CIA se cache derrière, finançant de soit-disant mouvements démocratiques ou humanitaires. Les méthodes sont plus subtiles que celles employées en Amérique du Sud ces dernières décennies, mais elles visent le même objectif. Installer des succursales de Goldman Sachs un peu partout. En tout cas c'est pas Hollande ou n'importe quel autre tocard français qui irait mettre sa branlée à un grand patron. Evidemment, eux, ils dinent ensemble. Partagent les mêmes hobbies. Baisent les mêmes putains. Merde, je suis reparti sur la politique.

Si je me lance dans cette entreprise, c'est que j'ai toujours écrit. Adolescent, j'ai tenu des journaux intimes, écrit des nouvelles. Puis ça a été des romans, des scénarios de films. C'est devenu en quelque sorte mon métier - si on peut appeler ça un métier, vu qu'à mon stade je suis ce qu'on appelle un loser. J'ai une capacité inouïe à échouer. Et une capacité encore plus incroyable à digérer mes échecs et à remettre le couvert. Dit autrement, je ne sais pas faire grand-chose d'autre. C'est dans mes veines. L'écriture. J'avais toujours renâclé à me lancer dans un blog, et là, après avoir lu cette phrase de Limonov, je me suis mis à blogger tout seul dans ma tête. C'était parti. Limonov est une VOIX - comme Henry Miller, Céline ou Selby. Et cette VOIX m'a parlé à moi directement. Elle m'a dit: "Tu es comme moi. Tu es mon frère. Ne te laisse pas aller. Continue. Tu te fiches pas mal de si t'es lu ou pas - comme moi à l'époque. Mais tu as ça dans le sang. Et tu as cette sensibilité particulière. Écris. Et bois un coup - à défaut de baiser." Bon, il a vu clair dans ma vie, l'enfoiré. C'est vrai que je ne baise pas trop ces derniers temps. Ma femme a un problème au vagin. C'est une fausse excuse, parce que le vagin c'est pas tout chez une femme. En fait je n'ai plus tellement de désir sexuel. Ça fait déjà un bout de temps. Ça reviendra, je ne m'inquiète pas. L'alcool aussi ça reviendra. Ma femme a mis le holà récemment, mais je sais qu'à un moment donné le whisky reviendra à la maison. Ce n'est pas que je sois alcoolique, mais le bon whisky, j'adore.

Donc je me suis mis à blogger tout seul, et après tout, pourquoi est-ce que je ne le ferais pas réellement? Je me fiche pas mal que ma vie n'intéresse personne. Je prends ça comme un exercice. Et peut-être que des gens y verront autre chose. J'ai toujours écrit. Quand j'étais gosse, mon coeur balançait selon l'humeur entre le désir de devenir écrivain et celui de devenir réalisateur. Du coup j'ai alterné les deux activités, qui somme toute sont complémentaires - a fortiori en France où la politique des auteurs fait qu'un réalisateur de film est souvent l'auteur du scénario, au contraire des Etats-Unis où à Hollywood le réalisateur reçoit généralement un scénario déjà ficelé, même s'il lui arrive de le remanier. J'ai écrit cinq ou six romans dont un seul a été publié, et tardivement, en 2006. Ça ne m'a rien apporté. Je n'ai même pas réussi à faire publier le roman suivant. Petit éditeur qui a disparu ensuite, 400 ventes à tout casser. Ça traitait du même thème que le dernier roman de Chuck Palahniuk qui fait partie de mes écrivains favoris. Son livre s'appelle Snuff et vous devriez le lire - comme tous les livres de Palahniuk. Je vous avoue que je lis énormément. À côté de ça, à mes tout débuts, j'ai réalisé des court-métrages avec un copain, j'ai travaillé comme assistant sur des plateaux, j'ai écrit des tas de scénarios qui ne se sont jamais faits, j'ai réalisé des téléfilms érotiques pour M6, un long-métrage en 2000 d'après une pièce de théâtre - un film de commande qui ne m'a ouvert strictement aucune porte parce qu'il n'a pas fait beaucoup d'entrées en salle -, jusqu'à l'année 2004 où ma carrière (on ne peut pas vraiment appeler ça une carrière tant ça paraît erratique, incontrôlé, irresponsable) a subi un virage à 180° puisque je me suis mis à faire du porno. Si ça vous intéresse je vous renvoie à mon site internet où vous pourrez lire sous forme de chroniques le début de mon expérience dans le monde merveilleux du film pour adultes. Quand je dis que je fais du porno, c'est bien sûr en tant que réalisateur. Je ne suis pas hardeur, vous l'aurez deviné. Je ne suis pas suffisamment bien membré pour ça, et je ne pense pas que ma femme l'aurait accepté. Déjà que ça ne lui plait plus du tout aujourd'hui, que je fasse ce métier - si on peut appeler ça un métier... Réalisateur de films de boules ça doit être la profession la plus méprisée - et méprisable - au monde... Déjà, en général, on se demande bien à quoi ça peut servir d'avoir un réalisateur sur un tournage de film porno... Peut-être à tendre des lingettes aux actrices. Mais bon. Moi ça m'allait très bien. Je trouvais ça rock n'roll. J'étais là par choix. J'avais dit FUCK au monde du cinéma, le vrai, pour faire enfin des films - vu que le système ne m'autorisait pas à en faire. Au début je me suis éclaté. C'était nouveau, c'était fun et surtout: J'ÉTAIS RESPECTÉ. Du coup, ma femme trouvait ça chouette. Ça avait son charme. Mes talents, ou disons plutôt mes compétences, étaient reconnues, et sollicitées. Je gagnais ma vie correctement, ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps. Ça a correspondu au moment où on a quitté la banlieue parisienne pour venir vivre à la campagne - une des meilleures décisions que j'ai prises dans ma vie. Oui, je l'avoue, pour un type qui n'aime pas le fric, j'étais quand même content d'en gagner. J'écrivais mes histoires, les actrices étaient ravies d'interpréter les rôles que j'écrivais pour elles, un film se tournait en six jours, l'ambiance des tournages était cool, aucun technicien pour vous casser les pieds vu qu'il n'y en avait pas, j'étais le chef, je faisais ce qui me plaisait et Canal + en redemandait... La belle vie, quoi. J'aimais les gens avec lesquels je travaillais. Les actrices, les acteurs, à quelques exceptions près -- mais vous trouverez tout ça dans mes chroniques. J'aimais travailler vite. Entre l'écriture du scénario, le tournage, le montage et la sortie du film, six mois s'écoulaient. C'était carrément jouissif. Dans le cinéma normal, six mois c'est à peine le temps qu'il faut pour écrire le premier jet du scénario, avec le producteur qui vous fait remanier le texte, le casting qui n'avance pas, les partenaires financiers qui tortillent du cul, les chaines de télé qui ne lisent pas, les gens qui ne rappellent pas... Le système dans son ensemble vous fait bien comprendre que vous n'êtes qu'une merde. Que vous n'avez pas le droit d'exister - comme le dit si bien le titre du film de mon copain HPG. Alors le porno ça me plaisait. Ça a continué à me plaire. Ça me plait un peu moins aujourd'hui - pour plein de raisons que je ne trouve pas utile de détailler ici. Aujourd'hui, je suis à la croisée de certains chemins. Tout peut s'effondrer, parce que je n'ai pas de boulot, pas de perspective, pas d'argent, comme d'un seul coup quelque chose peut sourire. Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est que je vais tâcher d'écrire sur tout ça, sur le passé, sur le présent, sur le futur... Et sur ce qui me tient en fait le plus à coeur - au-delà du cinéma, du porno et de la littérature -: LA RÉVOLUTION.

Ce sera le coeur de ce blog.

Parce que c'est ce en quoi je crois le plus profondément, et depuis toujours, comme on croit à l'aube du jour prochain, comme on croit à la naissance de son enfant, comme on croit au sourire de l'ange penché sur nous, aux astres et à la lumière, à la nuit et au désir.

La Révolution coule dans mes veines comme l'esprit du poète. Elle est dans mon sang. Elle arrivera.

Parce que c'est cette foi-là qui nous rendra plus forts.

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